jeudi 30 mai 2013

La vie est dans : Le post-cataclysme

J'ai besoin d'une pause.

Je suis dans mon bureau depuis 8h ce matin. Oui oui. Pendant que mes collègues professeurs se la coulent douce en savourant leur apaisement post-session, post-correction, post-poste-d'enseignant, quoi, moi, je travaille à monter un cours que je n'ai jamais donné. Oui, parce qu'il y a une partie de moi - toute, toute petite, promis - légèrement maso, workaholique et terriblement à l'argent.

L'option d'avoir un job, donc, cet été, me paraissait tout à fait appropriée. J'ai donc décidé de donner le français 104 parce que, tsé, c'est facile, la communication. Pis tsé, je communique...full...

Bref, ce matin, j'apprenais la matière avant de l'enseigner. Jusqu'à midi. Ensuite, j'allais enseigner la création de texte à mon groupe de la formation continue. Parce que, tant qu'à avoir un job cet été, autant en prendre deux. Ça aussi, c'est facile, la création de texte. C'est aligner des phrases, c'est ça? Je sais faire ça, créer des textes. J'en fais...full...

Alors, après deux veillées à réviser les subordonnées (nom nom...relative...nom nom...complétive...nom nom...circonstancielle...nom nom...participiale...nom nom...infinitive...nom nom...si vous venez de vous dire « kessé ça » dans votre tête, join the club...), je me suis mise à corriger mes épreuves finales qui étaient dues pour...heum...hier. Pas grave. Qui a besoin d'heures de sommeil, de toute façon? Ce ne sera pas rendu avant la semaine prochaine, et alors? Qui a besoin d'une bonne réputation de bonne fille à ses affaires et à jour dans son milieu de travail?

Bon, pour vous dire la vérité, je n'avais aucune idée de la date-butoir de remise des évaluations finales. Pour vous dire la vraie de vraie vérité, je n'ai pas vraiment  lu ma P.I.E.A. Pour vous dire la vraie de vraie de vraie vérité, même si j'avais travaillé tous les soirs depuis la fin de la session sur mes corrections, mes 132 copies ne porteraient toujours pas ma griffe finale.

Je suis une InDESScente. Pas une machine. Quoique...

Ah, et puis, de la schnoutte. Tant qu'à prendre deux jobs, autant en prendre trois. Ça fait que je me suis arrangée pour que mes deux cours d'été se donnent en un mois, pour accélérer mon retour à Québec. Pour le cours régulier, il n'y avait aucun problème ; il se donne de manière intensive, en quatre semaine, chaque année. Pour l'autre, il a fallut que je me négocie ça. Mon argument principal : « C'est comme les professeur de maternelle. Un groupe le matin, un groupe l'après-midi! ». Ça fait que des fois, j'appelle mes étudiants « les amis » et je leur fais croire que c'est pour vérifier s'ils sont attentifs.

Revenons à ma négociation. Quand j'ai pris le téléphone pour demander des changements d'horaire, j'avais un doute sur la possibilité de la chose. Les horaires, au cégep, c'est souvent coulé dans le béton. Armé. Sur un cadavre d'A.P.I. qui a essayé d'y gosser quelque chose. En fait, pour être honnête, je ne pensais absolument pas que ça allait marcher, mon affaire. Mais, faut le dire, la Formation continue y tient, à ses mignons. Alors ils m'ont patenté ça allegro. Mon cours de 60 heures se donne donc en cinq semaines. Ce qui veut dire la fin de semaine aussi. De toute façon, qui a besoin de se divertir? Autant revoir les règles de la virgule et des erreurs communes de syntaxe pour avoir la paix après. J'ai donc jusqu'au premier juillet à souffrir...

...avant de commencer le programme Explore. Et oui, de retour auprès des non-francophones de mon cœur! Ne craignez rien, c'est seulement le matin, il y a très peu de corrections...c'est un public difficile, mais après mon expérience Septilienne, j'en ai vu d'autres, non? Comme c'est seulement le matin, cela devrait me permettre de respirer l'après-midi, de profiter du Festival d'été, d'aller me promener au parc, de sortir avec mes amies...

...à mois que je puisse redevenir libraire l'après-midi. J'aimais ça, libraire. Oh, et puis, s'il faut que je redevienne caissière, ça me reposera l'esprit. Tant que c'est dans une librairie. Oui, c'est reposant, travailler dans une librairie.

Et suis je suis chanceuse, je serai engagée en septembre. Quelque part. Pour remplacer un congé de maternité ou une dépression. Et l'hiver prochain, je reviendrai probablement à Sept-Îles. Pour donner les cours de la session. Et je resterai pour la session d'été. Et je reviendrai à Québec faire Explore.

Nana. Pas une workaholique. Une ambitieuse, j'ai dit. Une carriériste.

Qui a besoin de sucre. Vite.

Ah, au fait : si vous me cherchez, je suis dans mon bureau...

mercredi 1 mai 2013

La vie est dans : La fin de session

Trente minutes de temps mort, sur ma pause du midi, pour vous écrire.

En trois nuits, j'ai dû dormir cinq heures. Je suis épuisée, enterrée sous les corrections, les préparations, les planifications d'examen. Mes jointures souffrent car ayant trop tenu le crayon (oui oui, je suis old style), mes paupières sont lourdes de maquillage et de sommeil, mes vêtements sont défraîchis car je n'ai pas fait de lavage depuis deux semaines au moins. Ce matin, je me suis réveillée au volant de ma voiture, alors que je conduisais vers le collège. Trois cafés ne furent pas suffisants et j'ai bâillé (oh! malheur pour mes étudiants) pendant les exposés oraux. J'en ai encore pour trois heures à enseigner. Par la suite, j'irai engraisser les profits du Toi et moi Café  qui a l'honneur de me voir chaque soir, chargée de cahiers Canada.

Vous vous souvenez de vos fins de sessions, mes copains lecteurs? Écrasés dans le hall de l'université Laval, parachevant vos traits d'esprits lors de l'écriture de vos derniers travaux, les veines dopées à la caféïne, les yeux rouges, nous faisions l'éloge de notre martyr d'étudiant. Pauvres petits que nous étions, toujours à la dernière seconde, toujours à la veille, toujours au désespoir de manquer de temps. Et pourtant...

De l'autre côté, c'est le poids des responsabilités qui tombe. Nos étudiants sont-ils prêts pour leur examen? Qui traîne à l'arrière? La consigne est-elle claire? La grille de correction, prête? Les étudiants ont-ils travaillé leurs erreurs? Comprennent-ils ce qu'ils doivent faire? Surtout, ne pas oublier d'apporter des dictionnaires pour leur évalutation finale. Qui risque de ne pas passer? Qui dois-je rencontrer avant la date fatidique? Est-ce qu'ils saisissent le sujet? Est-ce qu'ils ont compris le passage? Devrais-je leur montrer le film?

Corriger le groupe A. Donner un cours au groupe B. Le groupe C est en examen. Rendre la copie au groupe A. Deuxième partie d'examen pour le groupe C. Exercices sur la phrase pour le groupe D. Remise de travaux pour le groupe E. Examen du groupe D. Examen du groupe B. Cours pour le groupe F - ne pas oublier les photocopies. Cours pour le groupe A - correction. Le groupe E est en difficulté - intervention. Examen. Préparation. Correction. Intervention. Remaniement. Planification.

Flatline.

Je fais le plus beau métier du monde. Mais à la fin de la session, j'ai l'impression de prendre sur moi la réussite de 102 élèves à la mine inquiète, qui squattent mon bureau comme des militants en quête de résultats. Je prends le temps, j'explique, je réexplique...et je suis poursuivie partout. Au cégep. À l'épicerie. Au café. Bientôt, ils viendront frapper chez moi.

Je suis épuisée. . Je n'ai plus de patience, je n'ai plus de temps, je suis irritable, je manque de sommeil, je ne mange plus, j'arrache ma jolie tignasse de ma jolie tête, j'emmerde mes talons hauts, je n'ai plus aucun code vestimentaire (seul le pyjama est exclu...et encore!), je réplique du tac au tac à mes étudiants, je suis autoritaire, arrogante, je mords, je griffe, je gueule et je suis sur le point de faire manger son accordéon à mon colocataire.

Et puis, je me souviens que je suis folle, je fais une salutation au soleil, et je respire.
Plus qu'une semaine. Ensuite, les vacances.
Pour une semaine. Et on recommence.
Comme je disais, je fais le plus beau métier du monde.
Faut que je vous laisse. Y'a des étudiants qui cognent à la porte.